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L'électron libre du 667 nous a livré cet été le Film: Le Commencement, un album concept qui plonge l'auditeur.rice dans un univers parfois sombre et souvent mélancolique. C’est d’abord la structure du projet qui interpelle : 25 titres, une heure de musique, c’est notable... si l’on omet Jul et ses 40 titres par projet… mais c’est surtout son concept qui surprend : chaque morceau est inspiré d’un film ! Presque autant d’ambiances différentes que de titres donc. C’est un peu quitte ou double et on aurait pu s’attendre à un “gloubi boulga” maladroit mais l’album garde pourtant une cohérence d’ensemble, notamment grâce à la qualité des productions.
Sur certains morceaux (comme l'excellent Constantine) Zuukou reste en retrait. S’affirmant un rôle de réalisateur autant qu’acteur principal de son projet, il n’a aucun scrupule à laisser son égo de côté si cela sert sa vision artistique. Si les références aux films sont légions dans le rap français (souvent les mêmes d’ailleurs, de Scarface à Star Wars en passant par La cité de dieu…), l’artiste s’inscrit ici dans la relative continuité du superbe L’empire du côté obscur d’IAM : s’inspirant de l’univers et des personnages de chaque film pour proposer une fusion de son propre univers avec celui du long métrage en question.
Marqué dans l’ensemble par des mélodies mélancoliques (qui, il faut l’avouer, peuvent être répétitives à la longue) sur des titres comme Training Days (RIP Il lui Ressemblait) ou encore le planant Hyyerr avec le rappeur Italien Jolly, certaines productions sortent véritablement du lot, notamment ce riff entraînant sur Fight Club en feat avec le YouTubeur Théodort.
Vous l'aurez noté, un des autres points fort de l’album, c'est son lot de featuring originaux : de la merveilleuse Oklou en passant par le rappeur anglais A2 Anti, le Belge et surtout trop rare Krisy, le Roi Heenok (pour un morceau sur les armes à feu déjà légendaire - et flippant), le rappeur coréen Hijvc Kid, Vickie Chérie (du groupe Pirouettes), sa petite nièce (lors d'interludes joliment rêveuses et naïves)...
Tout comme cette liste de feat assez improbable, il nous semble utile de préciser que le projet peut parfois dérouter. Par exemple, l’atmosphère et les mélodies peuvent parfois paraître hors sujet vis-à-vis du film en question (comme Constantine, dont la prod et les mélos sont presque aussi mélancoliques que pour le morceau Le Tombeau des Lucioles...). L’ovni du 667 n’en fait qu’à sa tête et plane souvent loin de notre monde, se plaisant à déstabiliser. Une marque de fabrique qui fait de lui un artiste aussi à part qu'attachant (on se rappelle ses premières mixtapes colorées, où il rappait parfois sur de l’eurodance et dénotait au sein de son collectif à l'univers plutôt sombre).
Pour conclure, difficile de s’extirper de l’album dès sa première écoute tant le tout est immersif et nous laisse transi dans une ambiance de salle obscure. Reste, quand même, une interrogation : Zuukou Mayzie ayant dores et déjà prévu de décliner son concept en trois volets, parviendra t’il à le pérenniser et distinguer ses rêves de la réalité ?